Barbe Bleue

Il était une fois un homme fort riche, qui avait la barbe bleue, ce qui lui donnait l'air cruel. Il avait pris pour épouse la fille cadette d'une voisine. Un jour, la barbe bleue annonça à la jeune femme qu'il partait pour un long voyage. Il lui remis son trousseau de clefs, lui permettant de toutes les utiliser, à l'exception d'une seule une petite clef qui ouvrait un cabinet... [*]

La moralité de cette histoire de Charles Perrault qui se termine ici en points de suspension, est que la curiosité, malgré tous ses attraits, coûte souvent bien des regrets ; On en voit tous les jours mille exemples paraître. C'est, n'en déplaise au sexe, un plaisir bien léger ; Dès qu'on le prend il cesse d'être, et toujours, il coûte trop cher.

Et l'autre moralité pour peu qu'on ait l'esprit sensé, et que du monde on sache le grimoire, on voit bientôt que cette histoire est un conte du passé. Il n'est plus d'époux si terrible, ni qui demande l'impossible, fût-il mécontent et jaloux, près de sa femme on le voit filer doux ; Et de quelque couleur que sa barbe puisse être. On a peine à juger qui des deux est le maître.

Si la curiosité vous pousse à connaître ce qui se trame derrière cette porte, vous pouvez toujours vous rendre chez feu Barbe Bleue dans sa maison en ville, vous prendrez le petit escalier dérobé, et au bout de la grande galerie de l'appartement bas, vous vous trouverez juste face à la porte verrouillée, la petite clef dans votre main tremblante...

[*] Extrait de l'histoire de la Barbe Bleue de Charles Perrault, né à Paris en 1628 dans une famille de la haute bourgeoisie. Il publie en 1697 les Contes de ma mère l'Oye.
La jeune femme si douce et si frêle est de Jojo-Caramel, dessinée, peinte et réalisée par elle-même dans son petit cabinet toujours bien fermé avec une petite clef...